l'histoire d'Asteria

Au commencement, il n’y avait qu’Ouroboros.

Il n’y avait encore ni matière, ni énergie, ni mouvement. Il n’y avait même pas le vide, comme celui qui aujourd’hui sépare le monde des étoiles, car même le vide est quelque chose. Non, ce qui Le composait alors, c’était le Néant. Cela ne se définit pas comme l’absence de toute chose car, lorsque l’on dit de quelque chose qu’il est absent, nous avons conscience de la possibilité de son existence. Le Néant, c’est lorsque même l’idée de l’existence est impossible. Sauf pour Ouroboros.


Mais Ouroboros est supérieur à tout, y compris au Néant. Il n’a pas de commencement ni de fin. Il est le serpent de l’Infini et l’Eternel. Il est l’Être Parfait, sur qui rien n’a de prise, rien ne peut agir, rien ne peut interférer. Il Lui suffit d’une simple pensée pour que quelque chose passe du Néant à l’Existence et d’une autre simple pensée pour que cela retourne de l’Existence au Néant. Tout Lui est donc possible et tout Lui doit donc son existence.

Ouroboros est la Matière Première à partir de laquelle tout fut créé. La matière, l’énergie, le mouvement et le temps sont eux-mêmes composés de Lui. Ceci fait que tout ce qui existe, ainsi que le Néant lui-même, fait partie de Lui. Aussi loin que l’on aille, on se trouvera toujours en Lui. Il est aussi le Créateur de toutes choses. C’est Lui qui créa tout ce qui existe et lui donna sa forme et son contenu. Ouroboros sait tout, car le savoir même fait partie de Lui, fut créé par Lui et trouva sa cause en Lui.

Etant partout et sachant tout, rien ne peut entraver Son action.

Ouroboros pensa et un point minuscule apparut. Ainsi, par la création de cet unique minuscule point, Il venait de faire disparaître le Néant. Dorénavant, Il serait composé de l’Existence et du vide. Il décida de nommer ce point minuscule “univers” et le fit exploser en une myriade d’étoiles qu'on appelle Asteria, qui vinrent peupler le vide. Jamais plus, elles ne cessèrent de resplendir au firmament céleste.















Alors Ouroboros créa les deux mouvements: les choses lourdes iraient vers le bas et les choses légères vers le haut. Il créa également les quatre éléments. Le plus lourd était la terre. Puis venaient l’eau, le vent et le feu. Il les disposa dans l’ordre hiérarchique de leur pesanteur. La terre se trouvait donc au centre. Elle fut recouverte par l’eau, elle-même recouverte par l’air. Enfin, le plus léger des éléments, le feu, vint couvrir le tout.

Cette boule de matière, Ouroboros la nomma Monde. Afin que mouvement se fasse, Il entreprit de défaire l’ordre hiérarchique des éléments. Il plaça le feu au centre de la terre et l’eau dans le ciel, au-dessus de l’air. Les éléments bougeaient, alternant ordre et désordre, retournant systématiquement du désordre à l’ordre. Ouroboros se plaisait à voir comment Sa création se mouvait pour correspondre à l’ordre hiérarchique de leur pesanteur.

Mais Ouroboros était parfait, alors que Sa création était imparfaite. Alors qu’Il était conscient de Lui-même, Sa création ne pensait pas. Alors qu’Il choisissait ce qu’Il faisait, Sa création ne faisait que s’adapter. Alors qu’Il était capable de créer, Sa création ne faisait que se suffire à elle-même. Alors qu’il voulait aimer Sa création et être aimé d’elle en retour, elle en était incapable.

Ouroboros réunit alors l’amour qu’Il avait en Lui. Il en fit l’esprit, qui ne pouvait être ni touché, ni vu, ni senti, ni goûté, ni entendu, car il était différent de la matière. L’esprit contenait l’intelligence, composée de la raison et des sentiments. Ouroboros y en avait mis le plus de Lui-même: la capacité de choisir et celle de ressentir. Il associa la matière à l’esprit, pour que ce dernier puisse exister en harmonie avec le monde, et nomma le tout “vie”.

C’est alors que nous avons apparu. Nous étions des êtres parfaits, des Dieux semblables au grand Dieu et qui lui vouait tout leur amour ; Eternel et Infini, nous regardions avec Lui Sa création se mouvoir. Mais nous étions des Dieux et il apparût bientôt que nous aussi nous éprouvions le besoin de créer notre propre œuvre. Alors nous aussi nous créâmes la vie. Mais une toute autre vie, bien plus imparfaite. Sa capacité de choisir était partielle, car son savoir et son pouvoir n’étaient pas illimités. Sa capacité de ressentir était tronquée, car elle était composée de matière, neutre et impersonnelle. C’est à cet instant que les hommes apparurent.

Pour qu’on puisse s’aimer mutuellement, il fallait que la vie s’efforce constamment de se rapprocher de la perfection divine. Car elle était incapable de nous égaler. Nous avons donc créé, avec l’aide du Grand Ouroboros, le troisième mouvement: les choses supérieures iraient vers nous. Ainsi, la matière dont la vie était composée étant une chose lourde, elle fut posée sur le monde, car elle allait vers le bas. Mais, comme elle était aussi composée d’esprit, qui était une chose supérieure, elle tendrait vers la perfection divine.
Mais jamais la vie ne put atteindre cette perfection. Les hommes cupides et mauvais, inventèrent la notion de légende et nous bannirent de leur civilisation, s’inventèrent des Dieux qui feraient d’eux des êtres supérieurs. Ne pouvant atteindre la perfection divine, ils cachèrent la vérité et avec le temps oublièrent qui étaient leur Créateurs, ne leur apportant plus l’amour qu’ils attendaient. Il s’avéra qu’il fallut détruire cette œuvre ratée. Ouroboros créa donc un nouveau Dieu : le Dieu de la Mort. Les hommes connurent alors de grands malheurs, beaucoup d’entre eux périrent, touchés par les maladies et la colère des quatre éléments. Mais ils trouvèrent le moyen de perpétuer leur race. Les derniers survivants se cachèrent pour n’en revenir que plus fort encore. Ouroboros, furieux de notre travaille inachevé, nous bannit du Ciel, où nous résidions à ces côté, et nous envoya sur Terre vivre avec notre création.

En déambulant à la surface du Monde, immortels, nous nous sommes rendu compte que certains hommes valaient mieux que d’autres et se rebellaient contre leur société mensongère. Ceux-là étaient intéressants, des âmes pures qui s’élevaient au-dessus de leur semblables. Mais les autres, tous les autres, étaient voué à l’extermination.
Le Dieu de la Mort continua sa besogne sans arrêt, mais ils trouvèrent des parades aux maladies qu’il engendrait et aux catastrophes naturelles qui détruisaient leurs villes. Chaque année des millions de morts était à déplorer, mais ce n’était pas assez.
Les autres Dieux devaient agir. La Mort à notre tête, nous nous cachâmes dans l’ombre en attendant notre heure et en préparant notre vengeance.

Aujourd’hui, alors que le monde est plongé dans un chaos où les hommes se détruisent entre eux, nous sortons de notre tanière. L’heure de la vengeance à sonner, il est temps de retrouver notre place au Ciel, au côté du Grand Ouroboros, le Seul et l’Unique, l’Infini et l’Eternel, le Serpent de l’Eternel Recommencement.